Association avion René Grandjean

AU MEETING DE VIRY

Mon appareil était donc sur place. Le Blériot de Failloubaz s’y trouvait également, emballé dans une grande caisse, comme s’il n’avait jamais été déballé, ainsi que tous les appareils des pilotes inscrits. Il y avait Audemars, avec sa Demoiselle Santos-Dumont et un grand monoplan Tellier, muni d’un moteur Panhard-Levassor. Il y avait aussi Taddéoli avec un monoplan Morane, Amérigo, avec un biplan Aviatic de Mulhouse (copie du Farman); Carfagny, avec un Blériot muni d’un moteur ENV comme le mien; Spencer, avec un Bleriot comme celui de Failloubaz; les frères Henri et Armand Dufaux, avec leur appareil équipé d’un moteur Gnôme 50 CV, et le mien supporté par un ENV de 40 CV.

Les départs étaient affichés sur un grand panneau de dix mètres de haut. Un jour de ce meeting, Georges Cailler (son futur beau frère) voyant Failloubaz évoluer avec aisance, venait à chaque instant solliciter Grandjean.

Laissez-moi monter sur votre appareil… Il n’y a pas de raison pour que je ne vole pas aussi bien que les autres !

Je finis par me laisser influencer et par accepter, après lui avoir fait toutes mes recommandations. Il devait d’abord faire plusieurs lignes droites, au sol, avant de vouloir décoller, et je l’avertis bien que l’appareil décollait facilement. Il me promit tout et… je le laissai partir.

Il alla jusqu’au bout du champ en roulant très vite, mit le moteur au ralenti, descendit de l’avion, puis tourna l’appareil par la queue. Il se trouvait à ce moment-là à un kilomètre de nous. Nous ne le quittions pas des yeux. Et le voilà qui part à pleins gaz, décolle, monte à cinq mètres et s’y maintient…

Comme le grand tableau était face au public, donc dans le prolongement de son vol, il ne pouvait pas le distinguer et il venait directement dessus… Le temps d’y penser et ce fut la catastrophe… L’aile droite fut coupée net et le tout vint s’écraser au sol, à trois cents mètres de nous.

Quel soulagement nous avons eu, en le voyant ressortir de tous ces débris… sans une égratignure! Ainsi, pour la deuxième fois, mon appareil était cassé. Je n’avais plus qu’à ramasser les morceaux et à les porter dans le hangar, où quelqu’un vint prendre des photos.

Pendant le meeting même, je mis le tout sur un wagon, à destination d’Avenches.

C’étaient les ailes et la queue stabilisatrice, autrement dit toute la voilure, qui avaient le plus souffert. La réparation était relativement facile. Le plus coûteux était le renouvellement de la toile et de l’entoilage. C’était la troisième paire d’ailes que je devais mettre à mon oiseau !

C’est à ce moment que je me suis aussi décidé à faire un stabilisateur du genre de celui du Blériot, lequel me permettrait de régler facilement le centre de gravité de mon appareil.


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